Musique - Spring Awakening - London 2009
Parler de la découverte de la sexualité dans un spectacle musical, c’est tout le défi lancé par le spectacle Spring Awakening. Après avoir fait les beaux jours de Broadway, il débarque en Europe en commençant évidemment par Londres.
C’est dans le très beau Novello Theatre de Londres que se joue la pièce Spring Awakening. Situé sur Aldwych, nous sommes un peu éloignés du quartier des théâtres mais à quelques encablures de The Strand. Pas de problème avec les Will Call Tickets, aussi efficaces qu’à Broadway, et le public vient également en toute décontraction, bien loin de l’image de l’anglais guindé.
Ce musical est basé sur une pièce allemande de Frank Wedekind qui fut longtemps interdite pour des raisons que nous allons exposer ensuite. En effet, le thème de cette pièce est la sexualité et l’adolescence. Mais nous sommes bien loin du Lagon bleu ou des films érotiques. Nous nous retrouvons plongés dans l’Allemagne du début du 20ème siècle dans une institution luthérienne. Duncan Sheik a mis en place une partition pop rock de facture assez classique tandis que Steven Satter s’est chargé de l’adaptation du texte. Et c’est le chorégraphe Bill T Jones qui signe la mise en scène des parties dansées du spectacle.
Aussitôt entrés dans cette belle et ancienne salle, nous sommes surpris par le fait que le rideau est déjà levé. Sur scène, nous découvrons une estrade au centre avec une chaise. Sur les deux côtés, de petites tribunes avec des chaises, et au fond l’emplacement de l’orchestre. Oui, comme tous les spectacles de Broadway, c’est un orchestre qui joue en live. Au fur et à mesure de l’entrée des spectateurs, nous découvrons qu’une partie du public se trouve sur scène dans les petites tribunes. Ils seront au milieu des élèves de cette école.
C’est l’héroïne, Wendla, qui ouvre le spectacle avec une chanson où elle demande à sa mère de lui expliquer comment on tombe enceinte. Le décor est planté et nous découvrons les amies de Wendla qui parlent de leurs émois amoureux pour les garçons de l’école voisine. Nous basculons ensuite dans la salle de classe pour retrouver les deux héros masculins de l’histoire : Melchior, le meneur et rebelle, Moritz, le rêveur à la coiffure désordonnée. Particularité de la mise en scène, les différents adultes sont joués par deux mêmes acteurs ce qui a tendance à perturber le spectateur. La partition, certes classique à tendance folk ou rock selon les moments, joue sur le décalage entre musique et paroles. Si la musique peut faire “Disney” par moments, elle est largement compensée par des paroles crues. Car il est question de masturbation tout d’abord mais aussi d’inceste et de viol chez les jeunes filles de la pièce. Wendla se trouve confrontée à une réalité qu’elle n’imaginait pas, tandis que Melchior veut se battre pour ses idées tout en aidant Moritz à découvrir sa sexualité. D’autres thèmes sont abordés chez d’autres élèves comme l’homosexualité, beaucoup plus taboue à l’époque de cette pièce que maintenant….quoique.
Sans dévoiler toute l’intrigue de ce spectacle, il y a des thèmes graves et toujours d’actualité, surtout avec le retour du puritanisme. Les acteurs/chanteurs, sont évidemment jeunes et remplissent parfaitement leurs rôles. Malgré les noms, la mise en scène semble avoir localisé l’intrigue dans une pension anglaise, les deux acteurs adultes ayant un jeu très shakespearien. La chorégraphie est également remarquable d’inventivité et de modernité bien que les acteurs ne soient pas de grands danseurs eux-mêmes. Et une mention spéciale pour le décor magnifique de détails et de petites trouvailles.
Au final, un des meilleurs spectacles musicaux du moment avec un sujet plus ambitieux, mais dont la partition peut rebuter par son classicisme apparent. Il est prévu une adaptation française, à ce qu’il se dit. Espérons que la mise en scène sera conservée à l’identique et que ce ne sera pas trop francisé dans le mauvais sens du terme.
Mise en scène : Michael Mayer, Bill T Jones
Chansons : - “Mama Who Bore Me” – Wendla - “Mama Who Bore Me (Reprise)” – Wendla and Girls - “All That’s Known” – Melchior - “The Bitch of Living” – Moritz, Melchior and Boys - “My Junk” – Boys and Girls - “Touch Me” – Boys and Girls - “The Word of Your Body” – Wendla and Melchior - “The Dark I Know Well” – Martha, Ilse and Boys - “And Then There Were None” – Moritz and Boys - “The Mirror-Blue Night” – Melchior and Boys - “I Believe” – Boys and Girls - “There Once Was a Pirate”/“The Guilty Ones” – Wendla, Melchior, Boys and Girls - “Don’t Do Sadness” – Moritz - “Blue Wind” – Ilse - “Don’t Do Sadness/Blue Wind” – Moritz and Ilse - “Left Behind” – Melchior, Boys and Girls - “Totally Fucked” – Melchior and Full Company (except Moritz) - “The Word of Your Body (Reprise)” – Hanschen, Ernst, Boys and Girls - “Whispering” – Wendla - “Those You’ve Known” – Moritz, Wendla and Melchior - “The Song of Purple Summer” – Ilse and Full Company