Musique - Carl Orff – Carmina Burana (1935)
Qui n’a pas entendu au moins un extrait de cette oeuvre dans un film, une publicité sans savoir que c’était son nom et pire, qui en était l’auteur. Voyons voir qui était Carl Orff et ce qui a fait le succès de cette oeuvre
Carl Orff est né à Munich à la toute fin du 19ème siècle, en 1895. Ses parents l’initient à la musique et à 17 ans, il entre à l’académie de musique, malgré son manque de conformisme. Très précoce, il compose un opéra d’inspiration japonaise et inspiré de l’oeuvre de Claude Debussy. Mais c’est vers l’interprétation et le poste de chef d’Orchestre, qu’il se dirige. Après sa démobilisation en 1917, on le retrouve à ce poste à Mannheim et Darmstadt. Cela lui permet de vivre et de se consacrer en parallèle à la composition et à l’étude. Il se passionne notamment pour la renaissance italienne, en adaptant certaines oeuvres en allemand, s’intéressant par exemple à l’oeuvre de Claudio Monteverdi. Mais on le retrouve aussi à l’origine d’une école de Danse. Ces diverses activités, cette curiosité, ne l’empèchent pas de composer des oeuvres personnelles. Il s’inspire de poèmes du Moyen Âge retrouvés dans l’Abbaye de Beuren pour son oeuvre majeure : Carmina Burana.
Il s’agit d’une cantate scénique, c’est à dire de chansons profanes pour chanteurs et choeurs comme le titre original le suggère. En effet, le recueil est constitué de chants composés par des vagabonds et ecclésiastiques au cours du 13ème siècle. Au nombre de 46, Orff n’en retient pourtant que 24, à l’aide d’un exemplaire acheté en 1934 chez un bouquiniste. La première partie est reprise également en dernier.
Les deux premiers morceaux sont très proches l’un de l’autre, “O Fortuna” étant une ouverture très épique avec cuivres et percussions. C’est aussi la partie la plus connue de cette oeuvre. “Fortune plango Vulnera” en est le prolongement direct, ne causant aucune rupture à l’écoute. C’est un procédé que l’on retrouve sur d’autres “couples” de morceaux tout au long de cette oeuvre. « Veris Leta Facies », rappelle plus clairement les chants payens avec une musique lente, légère et posée, qui salue l’arrivée du printemps. Le morceau est rattaché à son pendant « Omnia Sol Temperat » mené par un soliste qui semble déclamer une sorte de prêche. Et c’est le moment tant attendu : « Ecce Gratum » est une véritable fête à un printemps resplendissant avec un déchainement de cuivres et de chœurs. De quoi danser dans le célèbre « Tanz » (repris par exemple par Dreadzone en sample) qui est aussi un des rares morceaux sans chœurs ni paroles. Ils arrivent dans l’enchaînement suivant : « Floret Silva Nobilis », ode à la forêt verdissante et fleurie. Ce sont des chants féminins qui enchainent, un groupe de jeune fille tentant de séduire de jeunes hommes avec l’arrivée des beaux jours. Les morceaux suivant sont d’ailleurs sur le thème de la séduction et de l’amour, dans des termes parfois assez crus qui montrent le paganisme ambient. Mais c’est un thème tout à fait différent qui est abordé dans « Estuans Interius », chanté par un baryton empli de colère et de rage contre cette vie qui l’emporte sur un fleuve tumultueux. Va-t-il finir sur le bucher tel ce cygne dans « Lacus Colueram » qui se sent brûler pour finir sur le plateau d’un sinistre repas ? On sombre dans la beuverie et la déchéance dans ce « Ego Sum Abbas », dans cette taverne de « In taberna quando sumus ». Le réveil est difficile. Certains ont eu une nuit d’amour avec une jeune fille tandis que d’autres ne se souviennent pas de ce qui s’est passé. Est-ce un piège ? Le jeune homme est séduit et veut délivrer la jeune fille de sa virginité (« Circa mea pectora »). avulso procul tedio, la pudeur est oubliée. Car la virginité de la jeune fille est un des thèmes récurrents de cette suite de chansons. ave decus virginum, Je salue la gloire de la vierge, glorieuse vierge. Elle est illustrée par les chants cristallins des choeurs feminins, la masculinité étant, en réponse, les chants des barytons. Cet environnement à la fois payen et religieux explique l’utilisation parfois contradictoire de ces morceaux dans de nombreux films, voir même publicités. On le retrouvera autant pour des scènes religieuses, épiques que pour des scènes plus bucoliques.
Pourquoi l’oeuvre de Carl Orff a-t-elle rencontrée un tel succès, au point d’éclipser tout ce qu’il a fait ensuite ? Difficile à dire car il essaya de retrouver des recettes similaires, comme dans ses adaptations des contes de Grimm. Il complète son tryptique paien par “Catulli Carmina” en 1943 et “Trionfo di Afrodite”, en 1953. Il écrit beaucoup moins ensuite et ouvre une école en 1961, à Salzbourg. Il s’éteint en 1982 et laisse en héritage cette oeuvre devenue intemporelle et que beaucoup croient plus ancienne.
Fortuna Imperatrix Mundi
- i : O Fortuna
- ii : Fortune plango vulnera I – Primo vere (“In Spring”)
- iii : Veris leta facies
- iv : Omnia sol temperat
- v : Ecce gratum Uf dem Anger (“In the Meadow”, “On the Lawn”)
- vi : Tanz (“Dance”–instrumental)
- vii : Floret Silva
- viii : Chramer, gip die varwe mir
- ix :
- a) Reie (“round dance”–instrumental)
- b) Swaz hie gat umbe
- c) Chume, chum, geselle min
- d) Swaz hie gat umbe (reprise)
- x : Were diu werlt alle min II – In Taberna (“In the Tavern”)
- xi : Estuans interius xii : Olim lacus colueram
- xiii : Ego sum abbas
- xiv : In taberna quando sumus III – Cour d’amours (“Court of Love”)
- xv : Amor volat undique
- xvi : Dies, nox et omnia
- xvii : Stetit puella
- xviii : Circa mea pectora
- xix : Si puer cum puellula
- xx : Veni, veni, venias
- xxi : In trutina
- xxii : Tempus est iocundum
- xxiii : Dulcissime Blanziflor et Helena (“Blanchefleur and Helen”)
- xxiv : Ave formosissima Fortuna Imperatrix Mundi (“Fortune, Empress of the World”)
- xxv : O Fortuna (reprise)