Automobile - Diesel, entre réalité et malhonnêteté
Si les premiers épisodes de cette émission de journalisme d’investigation “Cash Investigation” de France2 avait été particulièrement réussis, le numéro consacré au scandale sanitaire du Diesel est plus que criticable. Quand le sensationalisme l’emporte sur la rigueur.
La semaine dernière, l’émission Cash Investigation, diffusée sur France 2, s’interessait au scandale sanitaire du Diesel. Outre le fait que l’émission ciblait plus les constructeurs français que les autres, alors que l’Europe a démontré que les constructeurs allemands prenaient plus de liberté dans leurs prévisions de consommation et mesures de polluants, il y avait parfois de la malhonnêteté ou plutôt des explications cachées au téléspectateur. Ainsi sur la mesure du très nocif NO2, la présentatrice Elise Lucet montre avec un appareil de mesure une étrange différence avec les baies d’analyses d’un constructeur français qui a eu au moins le courage de la transparence. Passons sur l’étalonnage de ce petit appareil qui n’était pas démontré. L’expert du constructeur acquiesce et dit que l’appareil de l’animatrice dit vrai. Sauf que ceux du constructeur aussi et ils sont plus proches des conditions normatives. La norme est sans doute criticable ou peu claire mais c’est tout le problème des relevés de concentration de polluants :
- A un instant T, il est émis Ni éléments dans un volume Vi proche du pot d’échappement du véhicule. C’est ce que mesure le petit appareil mais pas ce que l’on respire, à moins de mettre le nez au niveau du pot d’échappement. La concentration mesurée est Ci=Ni/Vi
- Dans ce même instant T, il y a dillution des particules et on a Na éléments dans un volume Va bien plus grand que Vi. C’est ce qui est mesuré par la baie d’analyse pour être plus représentatif de la réalité. La concentration sera Ca=Na/Va très inférieure à Ci mais il existe des abaques pour corréler les deux chiffres. D’où l’appel de l’expert au calcul confirmant les 2 mesures.
- Dans un véhicule pris dans les embouteillages, on aspire au niveau des échappements et on piège dans un volume clos beaucoup de particules d’où une large augmentation de la concentration mesurée à l’inteérieur de l’habitacle du véhicule.
Plus grave sont les failles des Contrôles pollution : Mesurer CO et CO2 c’est bien mais rien n’est fait pour ces fameuses particules ou ces fameux NOx, bien plus nocives et les filtres s’encrassant par une utilisation urbaine, des petits malins ont trouvé la parade : Demonter le FAP (filtre à particules), c’est le Défappage. Les premiers filtres à particules pour les véhicules particuliers ont été montés par le groupe PSA, avant que les autres constructeurs ne suivent. S’ils ne sont pas parfaits, ils ont permis de suivre les prescriptions européennes en terme de polluants. Mais en contre partie, ils ne se “nettoient” que lorsqu’ils atteignent certaines conditions de circulation, incompatibles avec l’utlisation urbaine, d’où des encrassement, pertes de puissance, etc. Les garages pratiquent donc le Défappage pour garder les clients mécontents des performances de leur diesel en ville alors qu’il aurait été bien plus rentable pour eux d’acheter un véhicule essence. Chose que les constructeurs français ont dans leur gamme d’ailleurs ! Et au niveau des contrôles techniques, il est tout à fait possible de rajouter un point de contrôle de l’état du FAP pour identifier d’éventuels points de soudure. Pour les garages, la récupération des éléments métalliques est très intéressante car il y a des résidus très couteux (d’où le prix d’un FAP). Mais le reportage oubliait aussi de préciser que le chauffage urbain est responsable de 20 à 50% des particules (selon les régions et le type de chauffage) le reste étant l’industrie et le transport et des sources extérieures par les vents. Là encore c’est sur tous les tableaux qu’il faut lutter.
Avec une volonté manifeste de taper sur le diesel sans aller aux sources du problème et en accusant finalement les mauvaises personnes, Cash Investigation fait fausse route et montre les limites de l’exercice télévisuel. En effet, entre course à l’audience et rigueur journalistique, il faut parfois faire des concessions. Mais en ne faisant pas les bonnes, on perd la crédibilité qui est si longue à acquérir.