Web - Petite histoire d'un internaute - 2005 à aujourd'hui
(suite et fin de l’article 2001-2005) C’est en voyant des jeunes bacheliers curieux de comprendre les méandres de l’internet que je me suis revu à mes débuts, il y a pratiquement 18 ans. L’occasion de raconter ma petite histoire du web, où peut-être d’autres se retrouveront…
Ces années pour moi ont été celles de la créativité avec ce blog qui passa de dotclear à wordpress puis sur wordpress.com pour des soucis d’hébergement. Ce fut aussi Histozic.fr créé pour combler un manque de site généraliste en musique et racontant l’histoire autour des albums. Là, je me suis d’abord mis à spip avant de trouver une méthode de migration vers wordpress en transitant par dotclear. Et enfin, un jour, pendant un lointain voyage, je me suis dit qu’il manquait un guide des restos végétariens en français….joyeuxvg.free.fr était né. Mais ces blogs m’ont permis de voir l’évolution des méthodes de lecture du net.
On ne peut pas parler de l’histoire d’internet sans revenir sur** la Guerre des navigateurs **, notre outil principal pour butiner de site en site. Ainsi, j’ai commencé brièvement avec Mosaic, puis Netscape Navigator avant de céder aux sirènes de Microsoft lorsque le Navigator a grossi un peu trop à mon goût. Et puis, entre les failles de sécurité, les incompatibilités, les plantages, j’ai cherché d’autres solutions. Le passage à Opera fut bref, à moins de tenir compte du mobile (mais ça j’en parle un peu plus loin). C’est donc Firefox qui recueilli à nouveau mes suffrages… A nouveau car il est le digne héritier de son papa de Netscape. Là encore, il grossit un peu trop pendant un temps et la rapidité de Google Chrome me fit aller dans ce piège. Une saine concurrence finalement pour l’évolution de Firefox et qui a aussi ringardisé Internet Explorer, pourtant largement utilisé malgré les décisions de l’UE.
Ces années ont été surtout celles de la montée en puissance de plusieurs géants. Au premier rang, il y a Google. D’abord moteur de recherche incontournable, j’ai commencer à rechercher des images, puis à les stocker et retoucher via leur produit Picasa, puis à chercher et héberger des vidéos chez eux après le rachat de Youtube. J’y ai fait des documents grace à google docs, centralisé mes mails dans gmail avec les filtres antispam, etc etc…. J’ai été un bon client pour Google, jusqu’à essuyer les platres de Google +, avant d’en partir. Et justement, l’autre (r)évolution de cette période est le réseau social.
Car un géant a émergé de ce type de site : Facebook. Je me souviens très bien de ma première connexion à ce réseau encore balbutiant en France mais à la progression fulgurante. Jusqu’à présent, je passais par un blog familial pour donner des nouvelles, et je cherchais des anciens amis et camarades de classe dans Copain D’avant. A ma première connexion, j’ai trouvé ça triste comme interface, pas personnalisable et il n’y avait évidemment personne de mes connaissances, à part quelques relations aux USA. Puis petit à petit, tout le monde s’y est mis, porté par un buzz, un phénomène de mode, au point que tous les collègues y étaient. C’était “The place to be”! A cette époque, on ne “likais” pas à tour de bras et on acceptait aussi des “amis” par affinité de sujet. Tout cela a bien changé depuis et l’envers du décor nous est apparu. Au point qu’il est finalement plus difficile maintenant de retrouver des connaissances malgré les millions d’utilisateurs. Pour beaucoup d’utilisateurs, Facebook est devenu comme un blog simplifié, un hébergeur d’images et vidéos, tuant au passage les concurrents dans ces domaines. Facebook a voulu que l’on vive dans son microcosme avec ses jeux, son mail, … En sortir, c’est oser se couper de ses amis “drogués” du F bleu.
Car Internet est comme une drogue maintenant et se consomme partout et à toute heure grace au mobile. Avant l’arrivée de la 3G, on a eu droit au WAP, un format de site transitoire et mal foutu, autant que l’i-mode éphémère de NTT et Bouygues. L’arrivée de la 3G a été une première révolution, la seconde venant des terminaux mobiles devenus des smartphones. Quand je repense à mon premier PC à 75MHz et que maintenant mon téléphone a 4 coeurs de 1,6GHz, que sa résolution d’écran est presque équivalente à ce que je pouvais voir sur mon écran cathodique de l’époque… Maintenant plus de 30% du traffic de mes sites vient de mobiles et google privilégie dans son classement les sites adaptés. On parle “Appli” plus que site, jusqu’à forcer la main de l’utilisateur pour en installer une. On décentralise l’information, on la morcelle, on la butine. Pour ma part, cela fait trois ans que je privilégie les fils RSS, sélectionnant moi-même mes sources. Je regrette toujours la disparition de Taptu sur mon mobile et j’ai trouvé refuge sur gReader, faute de mieux.
Car l’information se consomme autrement. Un des moyens est d’utiliser Twitter, une sorte de mix entre l’IRC et le blog qui a vraiment décollé en France en 2011-2012 lors de la campagne des présidentielles. J’y ai vu l’évolution du public, passant des spécialistes, des journalistes, stars et politiques au grand public, s’insinuant dans tous les médias au point de voir des “hashtags” dans tous les sens. Maintenant, on retrouve plus de futile que d’utile, plus de clash idiots que de tentative d’intéresser l’autre. La tendance est générale avec des liens qu’on “aime” sans les lire vraiment, de l’image plutôt que du contenu. L’épluchage des statistiques de ces réseaux sociaux comme des sites montre un temps de présence de l’internaute et d’ouverture des liens en baisse. Tout va plus vite et la production de contenu est l’objectif pour occuper le terrain, même s’il s’agit de recopier des dépêches, des dossiers de presse.
Car derrière tout cela, il y a le problème du financement et son évolution. Au début, c’était la passion qui guidait la création et puis cela s’est professionnalisé avec la possibilité de monétiser un site grace à la publicité. Maintenant ce sont de grands groupes qui font la pluie et le beau temps dans ce domaine. Google a son agence de publicité et influe donc à la fois sur le référencement des sites et sur les annonceurs. Celui qui paie aura donc de la visibilité et qu’importe la qualité, c’est la loi du marché. Et celui qui attire du trafic par quelque biais que cela soit, fera fortune. En tant que blogueur non monétise j’ai pourtant ressenti ce piège de la course à l’audience. Rien qu’à travers les statistiques des sites, les classements, on peut se laisser griser et courir après la facilité. Maintenant nous sommes arrivés à un point où les sites rament car ils sont cousus de popups, scripts et vidéos publicitaires. Je ne peux plus me passer de bloqueur de publicité ou d’anonymiseurs pour ne pas subir des publicités ciblées. Cette décennie ressemble pour moi à une récupération par la “machine” de cet espace de liberté et de créativité qu’était le net.
Je me pose donc la question : **Qu’y a t il eu d’inventé dans cette décennie ? **Pas grand chose puisque c’est surtout une reformulation, une refonte dans la forme de solutions existantes. Les inventions concernent plus la protection de la vie privée de l’internaute et on ne peut pas dire que cela soit positif. Si j’ai pris du plaisir à voir cet outil évoluer, je n’ai pas l’impression, après cette prise de recul en 4 épisodes, que le rythme se maintienne. Il y a besoin de trouver un autre territoire, d’autres objectifs. On se protège de l’autre, des espions, on se replie sur soi. C’est mon sentiment plutôt pessimiste et qui montre que le net est assez similaire à notre terre où se battissent murs et miradors. L’avenir ne sera-t-il pas alors dans un autre mode de communication, un réseau parallèle, moins géocentré sur les USA? Une chose est sûre, comme dit Cyrille Borne , “mon web, …, est en train de mourir.”.