Géopolitique - TISA, la menace dissimulée derrière la COP21
Alors que tout le monde se réjouissait d’un accord sur le climat à Paris, un autre accord était négocié secrètement avec un impact sur le réchauffement climatique et l’environnement. Son nom : TISA.
C’est grâce au site Wikileaks que l’on en connait un peu plus. Mais TISA ( pour Trade in Services Agreement ) est un accord très vaste, négocié entre l’Europe, la Suisse, le Canada, les USA, le Japon, l’Australie, le Pakistan…. dans le cadre de l’OMC (organisation mondiale du Commerce) et en parallèle au traité TAFTA. Le vote du conseil de l’Europe sur l’ouverture des négociations a été fait en 2013 avec le soutien de l’ensemble des élus PS, UMP, MODEM, UDI à l’époque. Comme TAFTA, c’est dans le plus grand secret que se déroulent les négociations, donc sans visibilité de la part de ceux qui ont donné leur blanc seing.
Visant le sujet des services, TISA vise à libéraliser ce domaine et donc, le sujet de l’énergie. Cela signifie, entre autres, une privatisation de la question énergétique, une dérèglementation de toutes les professions de service réglementées,…Cela vaut par exemple pour les banques, les télécommunications, les notaires… On observera avec étonnement la coïncidence de la loi Macron qui vise justement le même sujet. On sera étonné aussi de voir des lois sur la santé privatiser la sécurité sociale en donnant tout pouvoir aux mutuelles privées (ce qui à terme ira vers un diktat des prix et un nivellement par le bas pour la qualité des soins). Mais le sujet de l’énergie est symbolique, lui aussi. Dans la version publiée par Wikileaks, on note dans l’article 1 qu’il n’y a aucune différente de faite entre les énergies renouvelables et non renouvelables. Cela signifie en clair que tout ce qui est valable pour les unes, est valable pour les autres.
Le principe de dérégulation et de coordination impose, par exemple, qu’il n’y ait pas d’intervention possible lorsqu’un accord a été signé entre un état et une entreprise. Les régulations possibles se trouvent donc “à minima”. Par exemple, si un accord de concession a été signé sur une parcelle, rien n’empêcherait l’entreprise de faire différents types de forages. La primauté est à l’exploitant dans les choix et non à l’état. Cela veut dire que le profit l’emporte sur le besoin énergétique. Les facilités accordées à un secteur (exemple, le solaire, l’éolien), doivent aussi être accordées aux autres (gaz de schiste, ou autre), avec toutes les conséquences néfastes que cela suppose. Cette libéralisation totale induit donc un risque de surexploitation des énergies les plus rentables (et les plus polluantes) sans freins et sans levier des états pour développer une vraie politique énergétique. Autant dire que la “transition énergétique” peut directement être jetée à la poubelle.
On peut même, de fait, se poser la question sur l’existence d’organisations comme l’OPEP face à ce type d’accord. Les états n’étant plus libres de fixer leurs quotas de production, leurs priorité, c’est** tout le secteur énergétique qui s’en trouve dérégulé**, et donc les prix des énergies fossiles. On imagine alors les conséquences sur la spéculation autour du prix du brut, ce qui est déjà valable en partie aujourd’hui, et donc du prix à la pompe pour le consommateur, les entreprises. Cela aurait également une influence non négligeable sur toute la géopolitique mondiale, pesant sur l’économie de pays se reposant sur les sources d’énergie. L’accord et les (maigres) engagements de la COP21 perdent donc de leur sens et on comprend mieux le fait qu’il n’y ait aucune sanction ou contrainte mais des objectifs virtuels. Pire même, on peut penser que dans les fameux 100 milliards destinés en 2020 aux pays en voie de développement, ceux-ci ne seront pas fournis par ceux qui tirent le profit des énergies polluantes mais par les seuls états, à l’image de ceux qui ont payé pour la crise de 2008.
Etant secret et mené surtout par des lobbyistes des entreprises, TISA (et son pendant TAFTA) est un danger immédiat pour l’avenir de cette planète. Il est aussi un danger pour l’avenir des services publics, de l’intérêt commun et par extension, de l’économie mondiale (la dérégulation bancaire revient à une situation antérieure à la crise de 2008). Mais comment le citoyen peut-il peser maintenant sur cette négociation ? Comment peut-il forcer l’Europe ou son pays à se désengager de ce processus, dont sont absents les leaders économiques de demain (Inde, Chine, …) ? La confiscation des processus dits “démocratiques” est patente. Doit-on alors répondre de manière proportionnelle ?