Blog - Le petit monde du libre en émoi pour si peu...
D’habitude, je ne fais qu’un billet de fin de semaine. Mais comme je vois pas mal de billets intéressants chez mes collègues dans une semaine très riche, je ne pouvais manquer d’en parler.
Pour celui qui n’est pas familier avec ce “petit monde du libre”, il faut resituer rapidement. Je vais parler de GNU Linux, le système d’exploitation alternatif dont Ubuntu (édité par Canonical) est la “version” la plus emblématique auprès du grand public (mais pas toujours la plus recommandable, c’est un autre débat). Je vais aussi parler d’autres alternatives et aussi du petit à coté qu’est la presse “informatique”. Vous allez voir que, même si vous n’êtes pas pointu sur le sujet, ça peut avoir une influence sur votre petite vie puisque le numérique (ET NON LE DIGITAL!!!) est partout.
Donc Canonical annonce l’abandon de son “interface” Unity dans le prochain Ubuntu. Je m’en réjouis car pour moi ça veut dire qu’on aura un environnement de moins à maintenir, donc moins de dispersion des forces. Je n’y voyais aucun intérêt par rapport à un Gnome 3 disponible un peu partout (si si, même sur archlinux) et qui a un objectif similaire : Avoir une interface utilisable en tablette/tactile et en PC classique. Maintenant, ça veut dire aussi que Ubuntu et Canonical se recentrent sur le coeur de cible et abandonnent le desktop grand public ( et non le desktop pour initié) . J’avais bien aimé l’excellente version Mate de la dernière ubuntu dans mon récent test. Par contre, je ne comprends pas la version Budgie ou même lubuntu et xubuntu quand on a déjà assez à faire avec la maman d’Ubuntu, la Debian et ses variantes en unstable à la sauce lxde ou xfce pour celui qui veut tirer le meilleur parti de sa machine. Oui, je sais, ça devient technique pour ceux qui n’y connaissent rien, alors je reviens à des trucs plus connus. Là où je m’inquiète, et je ne suis pas le seul, c’est sur des systèmes GNU/Linux sur des pc portable hybrides actuels. Ce n’est pas vraiment la tasse de thé des utilisateurs de ce système qui préfèrent du robuste et du classique ou carrément une tablette, dont le marché s’écroule quand même un peu. Bref, le libre en tactile portable, on peut dire que c’est mort à brève échéance, autant qu’un windows phone. Android (et iOS pour les privilégiés du système comme les Le Pen de Montretout ) va régner quelques années avant qu’on change vraiment de terminal pour tenter autre chose. Le seul espoir reste, pour le geek bricoleur, des forks d’android délestés de la surcouche google, ce qui risque d’être pas mal verrouillé par Alphabet qui veut tout savoir sur nous (on nous spolie, comme dirait Arthaud), surtout avec la diversité de téléphones. Bref, ça s’appelle lineageOS surtout, mais le nombre de smartphone supportés me fait rire….jaune. Là encore, se concentrer sur les meilleures ventes de smartphone peut être une solution, ce qui veut dire encore qu’il va falloir s’équiper en occasion (oui, on a du mal à finir les fins de mois, dans le libre). L’histoire recommence (un peu comme l’histoire de l’Europe, quoiqu’en disent Asselineau, Dupont Aignan ou Macron d’un coté ou de l’autre )et souvenons nous juste du nombre d’années de domination de Windows…
Pour se souvenir, on a eu des sites spécialisés, comme PC Impact devenu Next Impact. Next Impact a annoncé cette semaine passer en payant à … 4 Euros par mois. Personnellement, ça ne me fait pas grand chose puisque je ne lisais pas ce site, ou alors très rarement. J’ai d’autres sources plus ciblées mais cette nouvelle a justement un impact plus important qu’on ne pense. Car cela veut dire qu’il faudra bientôt choisir entre une information payante et une information gratuite tellement sponsorisée qu’il faudra se poser la question à chaque article sur l’honnêteté de l’information. Je sais, c’est déjà le cas pour 90% des blogs littéraires et musicaux….(oui, je fais mon Poutou!). Mais comme j’ai été brièvement abonné à Médiapart, je peux faire le comparatif aussi. On peut payer et ne pas trouver son compte non plus pour des raisons éditoriales. Si je ne lis pas Next impact, c’est aussi parce que je n’y trouve pas le plus qui le rendrait indispensable par rapport à ce que je trouve ailleurs. Je lis le canard enchainé parce que je ne trouve rien d’équivalent, tout en gardant un regard critique…et ça me coute pourtant 4,8 euros par mois, si on regarde bien, avec la possibilité de zapper une semaine ou deux si je veux, en l’achetant en kiosque. Là, on me force la main pour un prix que je trouve excessif du fait qu’on ne paye pas la matière papier et autres métiers spécifiques à ce type d’édition . On ne me fera pas croire que ça coute plus cher que le canard, justement, même avec un revenu universel (il y a pas pensé Hamon, à la presse). Je lis aussi d’autres sites ou périodiques en géopolitique ce qui est un domaine tout aussi pointu, si ce n’est plus que l’informatique et l’internet. Je paye ou je lis gratuitement mais peut-être vais-je devoir tout payer. A ce moment, j’irai jusqu’à me demander si la presse papier n’est pas aussi bien sur ce marché de niche (et on voit de nouveaux titres se faire une place…). Il faut dire aussi que je ne m’y retrouve pas dans la forme actuelle de la presse en ligne avec ses articles entrecoupés de pubs ou pas du tout adaptés à la lecture sur smartphone. Donc autant passer au kiosque avant de prendre son train de banlieue, par exemple.(oui, ça fait un peu oldschool, façon Lassale ou Cheminade)
Tout ça pour dire qu’on va devoir s’habituer à deux types de “presse”. Et ça fait un moment qu’on le dit… D’un coté, on va avoir la presse de l’instant, de la dépêche, qu’on peut recevoir encore aujourd’hui par un flux RSS (jusqu’à quand…?) ou par applis . Et il y aura la presse de réflexion, de dossier, de tests approfondis mais qui devra aussi s’éloigner de tout ce qui exerce sur elle une pression, c’est à dire la publicité, les financements par des grands groupes. On peut dire aujourd’hui que nos hebdomadaires et quotidiens ont toutes les chances de disparaître d’ici 10 ans s’il n’y a pas un grand ménage de fait… Quand je vois ce que sont devenus Marianne, le Nouvel Obs, le Monde, Libération ou Le Point, et leurs scores de ventes, ça risque d’aller plus vite si on arrête enfin les subventions à la tête du client. Après, on a toujours une presse plus récréative qui se maintient mais elle va aussi devoir faire face à la concurrence des … réseaux sociaux qui sont à la fois sources d’informations (hum…) et récréation.
La fréquentation de Diaspora (source the fédération)
Et justement, cette semaine, j’ai entendu beaucoup parler de** Mastodon comme alternative à Twitter.* Youpi, c’est libre et décentralisé, crie-t-on! Et là je réponds à la Fillon : Et alors ? Déjà il y avait GNU social… Et Mastodon est un leurre ! C’est une mode passagère comme l’ont été Ello, réd matrix, gnutella, comme l’a été Medium pour les blogs, etc…Le grand public se fiche royalement que ça soit décentralisé, il ne comprend même pas ce que c’est. J’en suis encore à expliquer twitter aux collègues…Tout le monde est trop content de foutre sa trogne dans des selfies partout, de tout façon. Donc après, c’est juste de la cosmétique en rappellant aux premiers utilisateurs de twitter l’utilisation de tweetdeck, ou en permettant de faire plus long que 140 caractères. Aucune marque, aucun média ne va sur Mastodon. Aucune star incontournable n’a abandonné twitter pour ça. Donc aucun utilisateur ne changera ses petites habitudes et continuera à faire des livetweets d’émissions de télé ou de sortir des énormités pour attraper du follower. On peut me dire comment créer une instance mastodon sur n’importe quoi, que je m’en fiche. Les gens (mode Mélenchon on), ils veulent un point d’entrée et pas 36000 instances. Il n’y a que les gens du petit monde du libre qui comprennent l’intérêt et sont prêt à exporter et importer un compte d’une instance à l’autre tous les ans parce que la première a cessé de vivre. C’est pour cette même raison que Diaspora plafonne et que Framasphère a quand même été le point d’entrée français qui a fait décoller le truc après bien des essais. Et de toute façon, on retrouvera peu à peu les mêmes comportements sur mastodon, si d’aventure ça marche, ou bien ça restera un réseau social de niche comme ce qu’est devenu Ello maintenant. Les vraies questions sont à chercher dans le besoin d’un tel outil (pour moi, aucun) et surtout comment simplifier l’accès au décentralisé en garantissant une confiance sur l’utilisation de nos données.
Beaucoup d’émois donc pour ne retenir que peu : Oui, la liberté dans la lecture de la presse risque de se restreindre mais aussi de se réinventer. Oui, le mobile ne sera pas plus libre que ne l’a été l’ordinateur personnel, c’est à dire à pas plus de 3 ou 4% du marché, vent dans le dos. C’est regrettable mais c’est ainsi, tant que le libre ne travaille pas en avance de phase sur des terminaux naissants. Et même comme ça, il y aura toujours un petit malin, comme Google avec Android, qui récupérera des outils libres pour en faire son business. Ok, ça casse peut-être un peu le moral, mais il y a pourtant moyen d’être plus malin que ceux là…. mais ça, c’est une autre histoire qui reste à inventer en ce mettant à la hauteur de chacun.
ps : comme d’habitude, j’ai mis quelques liens vers les collègues…qui ne m’ont rien demandé. Et je ne demande rien non plus ;-)
Ce billet a été rédigé en “pyjama et mal rasé”, parce que l’habit ne fait pas le blogueur…