Réflexion - L'Amalgame de la colère
Je cherchais un sujet pour aujourd’hui et soudain, il est arrivé, sur son cheval noir…Non, en réalité c’est avec un bon vieux toot-clash sur Mastodon ( oui, j’y refais un tour sur @icemanfr75@mastodon.social) avec un autre blogueur que l’idée est venue. Il y a des gens qui ont vraiment des colères récurrentes qui les mènent à faire des amalgames infectes.
Oh, je ne parle pas ici du racisme qui mène à dire que si un terroriste est musulman, alors tous les musulmans sont potentiellement des terroristes. Mais c’est pourtant du même ordre, mais vis à vis des … Vegans. Vous savez, ces extrémistes qui ne font pas de mal aux animaux mais agressent les légumes, ces gens dont je suis. Sauf qu’on me dit en substance que je suis dans les fous dangereux qui menaceraient la nature, les gens… Il y a quelques années, dès qu’un couple vegan avait un enfant mal nourri ou mal soigné, on tirait dessus à boulet rouge. Comme si j’allais faire la même chose dès qu’un couple carnivore a un enfant mal soigné et mal nourri en disant : “La viande c’est mauvais pour les enfants, les carnivores sont des monstres”. Evidemment, sans cautionner la viande, je ne me vois pas dire que la majorité de la population mondiale est une bande de monstre incapable d’élever correctement un enfant. Je pourrais vous donner bien des exemples d’amis vegans dont l’enfant a été élevé parfaitement bien et est en bonne santé. Bref, je ne fais aucun amalgame entre un fait divers et le cas général. De la même manière maintenant, il y a des militants vegans qui agressent des gens physiquement et veulent imposer leur vision de la société en bons extrémistes. J’ai un scoop : J’ai les mêmes chez les viandards, les frugitariens, les libertariens, les libristes (coucou le blogueur qui oublie qui il est…), les rastafariens, les féministes, les profs de math, les chirurgiens du rachis, etc… Dans tout groupe, vous trouverez des gens qui vont trop loin, qui veulent imposer leur vision des choses par la force. Est-ce une raison pour jeter le bébé avec l’eau du bain, pour généraliser ? NON. Et bien désolé, je n’aime pas qu’on me montre du doigt en disant des contre-vérités et en faisant un amalgame, surtout quand c’est à longueur de posts récurrents.
Pour la petit histoire, sur ce blog dans une ancienne adresse, il y avait eu un large plaidoyer contre les dérives que j’avais observées il y a 7-8 ans dans le mouvement animaliste et vegan militant. J’ai jeté le billet car c’est bon, ça a fait le tour et la situation a évolué…Je l’ai déterré pour l’occasion car je garde mes archives. A l’époque, je ne parlais pas d’agression ou de terrorisme mais plus simplement de dérives racistes, notamment envers des religions, des origines et là aussi ça y allait dans l’amalgame, certains me touchant plus personnellement. Je pense qu’il y a toujours des gens comme ça dans les manifestations mais c’est une très petite minorité. Ne retenir que cela est insultant pour tous les autres. Mais ne rien faire en interne contre cela est aussi un problème. Pourtant, je ne récuse absolument pas l’action militante type Animal Liberation Front (dont j’arbore parfois les couleurs…) lorsqu’il s’agit de sauver des animaux en dénonçant des pratiques barbares. Il ne faut justement pas tout mélanger. Un pot de peinture rouge sur la devanture d’un fourreur, ça ne me choque pas c’est vrai. Ça fait parler du sujet, montrer des images de la réalité…et ça se nettoie. L’agression physique du fourreur qui ne fait que vendre son horreur, ça me choque plus car je suis contre la violence. Il faut rester logique.
A quoi bon dénoncer l’impact supposé du veganisme ? Je vois bien que certaines personnes font une fixette sur ce mouvement qui serait presque responsable du réchauffement climatique. La baisse des ventes de viande ne vient pas du seul veganisme, un peu plus des images de l’élevage intensif… pas plus que la fermeture des bouchers quand on préfère acheter des barquettes de viande de merde au supermarché. Aujourd’hui, l’industrie agro-alimentaire et le marketing utilisent l’argumentaire vegan pour vendre des produits pas toujours très jolis. C’est comme pour le bio où ça vient de loin, parfois avec de l’esclavagisme, trop d’eau et de chimie, alors qu’à coté de chez soi on a mieux mais plus cher. En réalité, toute mode alimentaire se trouve récupérée pour faire des produits peu reluisants. J’ai testé ici quelques produits justement, et je parle des ingrédients ou du cas de conscience quand ça vient de société peu éthiques. Il faut justement éduquer en ce sens mais c’est dans un cadre plus général que le simple veganisme. Dire que tout produit vegan est de la merde est une belle connerie. Il y a de bonnes choses très simples et **des trucs que je me refuse à acheter. **
Migrant Mother par Dorothea Lange 1936
J’étais la semaine dernière dans une boutique vegan pour quelques courses et j’ai trouvé ces fameux burgers “Beyond Meat” qui ressemblent comme deux gouttes d’eau à un vrai steak. Désolé, ça je ne peux pas. Déjà ça vient de très loin, et en plus avec des graisses pas très à mon goût, même si sans OGM, etc….L’aspect même me répugne. Et pourtant je suis paradoxal car il m’arrive de faire un kebab avec quelques morceaux de protéines de soja français qui ressemblent à du vrai kebab. Mais j’en fais le plus souvent sans ça. Je pense que chacun d’entre nous a des moments où il prend des choses bien et de vrais merdes car personne ne peut être 100% exemplaire. On essaye juste de tendre vers un peu plus d’éthique en ayant une réflexion sur nos achats et c’est déjà un grand pas. Pour moi, ça s’est fait dans le végétarisme, l’absence de cuir, en essayant de moins polluer dans les transports, etc… D’autres préféreront des vêtements éthiques, jardinerons, ne prendrons que du local, auront des toilettes sèches, que sais-je encore ? Chacun a sa manière d’agir…. ou de s’en foutre carrément d’ailleurs. Je me méfie des donneurs de leçons, des gourous. J’écoute plutôt les expériences de chacun.
Je dénonce par exemple les gens qui achètent des SUV en expliquant le pourquoi… Là c’est factuel, on sait ce que fait ce produit et on peut connaître les motivations des acheteurs. Donner l’impact d’un régime vegan est plus complexe, par contre car aucun vegan ne mange pareil. Il faudrait définir ce qui constitue ce régime, sa provenance, ses consommations, son transport et faire le même calcul pour un régime dit normal…Le peut-on sur ce dernier ? Non déjà rien que pour la France. On peut juste dire la consommation moyenne de viande, poisson, pain, etc mais ça n’ira pas plus loin et ça donne une moyenne sans s’intéresser aux disparités régionales. Alors imaginez sur le monde quand on ne peut comparer un Chinois de Pekin à un Texan ou un Marseillais.** Impossible de faire un amalgame**, donc… Et pourtant on peut croire dans une universalité de l’humain, par ailleurs, au delà des différences culturelles, une universalité dans les réactions, par exemple.
J’écoutais avec attention le philosophe Francis Wolff qui parlait de son dernier ouvrage. Pour lui, nous n’avons jamais été aussi conscient de notre appartenance à un même groupe, celui des humains, par rapport à l’enjeu du réchauffement climatique . Mais en même temps, cet universalisme et l’humanisme qui en découle est en danger. Je le rejoins donc sur ce point et son analyse de l’insulte permanente faite à ceux qui sont humanistes, droitsdelhommistes, etc…Je le rejoins sur cette impossibilité de dialogue, cette colère permanente et immédiate. Certes, il réfute l’animalisme mais je n’ai pas la même définition que lui. Je considère en effet que nous sommes des animaux comme les autres habitants de cette planète. Nous sommes parmi les espèces dominantes et avons, comme d’autres espèces dominantes, des interactions avec d’autres espèces. Il y a des prédations, des dominations, on ne peut le nier. Mais il n’est pas possible de faire abstraction de notre capacité à mieux traiter nos voisins les animaux, ou ceux avec qui nous avons passé un contrat moral pour les élever, les protéger, les nourrir, pour parfois les manger. Ma vision de l’animalisme n’est pas celle caricaturale et utopique d’une société des animaux où personne ne mange personne et où le loup broute de l’herbe. Nous ne sommes juste pas des loups mais des humains qui ont oubliés leur place dans la nature. Et si la possibilité est offerte de se réguler soi-même dans la consommation du vivant, alors prenons là. D’où mon choix du veganisme. Je ne me délecte pas pour autant de la violence d’une espèce prédatrice par rapport à une autre comme cela devient schématique dans les documentaires animaliers.
Enfin, je ne suis pas rancunier vis à vis de la personne en colère qui a provoqué cette ire et ce billet. Mais je ne peux m’empêcher de penser à un individu qui, dans un forum que je fréquentais il y a des années, prenait un malin plaisir à troller tout sujet que l’on mettait sur … un groupe de musique. Il le détestait à un point ridicule sans qu’il soit possible de s’expliquer avec lui. Je n’aime pas certains artistes mais je ne vais pas les insulter tous les 4 matins. Je pense que ça mérite de creuser pyschologiquement sur ce besoin d’agression permanente envers une catégorie de la population quelle qu’elle soit. La personne se sentira bien mieux et tout le monde autour avec. En fait cela tient largement au principe du micro-blogging et de ce côté réaction immédiate. Par exemple, j’ai eu le tord de mettre quelques réactions à chaud ou retweet sur la mort de cette femme qu’on a retrouvé mangée par des chiens. Aujourd’hui on en sait à peine plus mais j’ai réagi épidermiquement car on parle de chasse à courre, une pratique de plus en plus interdite à travers le monde mais qui conserve un lobbying efficace au plus haut niveau. J’ai supprimé aussi sec ces tweets/toots/pouets en me reprenant. Ces systèmes nous poussent à exprimer des colères latentes, rentrées. Il y a par ailleurs bien trop d’accidents de chasse pour ne pas instrumentaliser une mort horrible. L’enquête montrera ce qui s’est passé, je l’espère. Loin de moi non plus l’idée d’aller agresser un chasseur… mais le déranger pour qu’il ne tue pas, par contre, hé hé.
Nous sommes hélas dans un monde où beaucoup de colères grandissent, où l’ignorance et l’arrogance les font prospérer. Les puissants ont peur de ces amalgames de la colère mais, comme je le disais encore la semaine dernière, jouent avec les colères pour diviser les gens. Il y a une chose qui me met réellement en colère, c’est cette manipulation autour des retraites et régimes spéciaux. Car si on cumulait la sécurité social, l’assurance chômage et les systèmes de retraite, le modèle français est largement excédentaire mais souvent utilisé pour renflouer d’autres postes moins reluisants. Mais on se contente de montrer du doigt ceux qui coûtent plutôt qu’ils ne gagnent, souvent à cause de ponctions pour une mesure éphémère (les primes gilets jaunes, par exemple) ou de baisses des recettes favorisant les plus riches. Je vous conseille de vous intéresser à la question des fonds de réserve des retraites, des retraites complémentaires, de la CADES, …très souvent largement excédentaires et qui devraient dégager une manne financière à l’horizon 2024 avec la fin de la mise en place de lointaines reformes. Mais quand on voit ceux qui sont à la cour des comptes, plus arc-boutés sur leur dogmatisme que sur les règles de calcul et de statistiques, il ne faut pas s’étonner que l’on tire plus sur les aidants, les services publics que sur les profiteurs. Renseignez vous plutôt que de subir la propagande d’une caste avant de vous retrouver avec rien pour vos vieux jours pendant que d’autres ont des retraites chapeaux en ne faisant qu’assister à des CA ou en faisant du copier coller de rapports prémâchés… C’était mon coup de colère pour le 5 Décembre.
Assumer ses propres colères est sûrement plus difficile qu’aller chercher la raison de celle des autres. Il n’y a pas un dicton avec une paille et une poutre ? …Je laisse le dernier mot à un monsieur …En colère (qui trouvera le jeu de mot?)