Blog - Covid-19 et moi, épisode 1/?
Cette histoire de Coronavirus de type Covid-19, c’est quelque chose qui dure pour moi depuis fin Janvier. Pas seulement dans le suivi médiatique mais personnellement.
Non pas que je sois positif et malade, je vous rassure (enfin au moment où j’écris), mais parce que j’ai de la famille en Chine et qui s’y trouve très bien d’ailleurs. Nous nous sommes inquiétés, nous avons vu le virus se propager, nous avons su que c’était grave, nous avons cherché des protections (au cas où, au tout début ) et nous avons mis du temps à envoyer un minimum. Nous en avons gardé pour nous (le strict minimum) parce que déjà en début Février, nous savions que ça nous toucherait. Et déjà, ça venait de l’étranger (Made in Portugal). Au pire, ça peut servir pour la grippe…enfin l’autre, celle qu’on sait vacciner, ce qui fait une grosse différence malgré les similitudes. Avec madame qui est particulièrement sensible (déficience immunitaire, asthme…son dernier “rhume” fut vraiment très difficile à traiter et très handicapant et elle garde des séquelles) il vaut mieux aussi prévoir le pire. J’ai toujours du gel hydroalcoolique et elle aussi, vieux réflexe de notre passé globe-trotter. Bref, notre côté prévoyant nous a fait prendre des précautions minimales. Pas de bises ou de serrages de main cet hiver comme les autres, quitte à faire croire qu’on a un petit rhume pour ceux qui ne comprennent pas. Et puis tripoter tous les gens de l’open-space, ça devient un peu ridicule quand après chacun se fout de ce que l’autre fait...hum. (pas une sortie depuis mardi)
En plus, en décembre et janvier, j’ai fréquenté le milieu hospitalier un peu plus, vu des personnels en grève depuis 1 an dans l’indifférence générale car ils continuent de travailler, obligés par les patients…mais donc inaudibles. Les chambres sont rapiécées, les matériels rares, les dessertes informatiques roulantes mal conçues pour l’activité, … On pourrait en parler pendant trois articles tant il y a à en dire. Quand je vais chez mon médecin de ville, j’y vais 45 minutes avant l’ouverture pour passer une heure après cette même ouverture au mieux, quand c’est sans rendez-vous. Et une heure après l’ouverture, tous les tickets sont pris pour finir la journée de 8h. C’est vous dire l’état du système de santé dans une ville qui n’est pas un désert médical et qui n’était pas en forte période épidémiologique. Les ministres de la santé qui se sont succèdés sont là pour faire joli et gérer du budget en peau de chagrin. S’il avaient un peu d’honneur, ils taperaient du point sur la table pour demander une rallonge de 50% pour remettre tout à niveau ou ils démissionneraient (ndr : j’ai écrit ça avant le #BuzynGate). A un moment, le temps du consensus mou n’a que trop duré !
En fait, c’est comme dans ma boite où on me demande de faire bien plus et bien mieux qu’avant avec 20% de moins chaque année. Super on fait des bénéfices jamais atteint et ça me fait une participation et un intéressement. Mais à vivre tous les jours, c’est l’enfer. Pour tout vous dire, la nouvelle filiale allemande de ma boite devait avoir 3 à 4 fois plus de personnes pour une même fonction. Ils étaient en déficit, pas nous mais il y a sans doute un juste milieu. La santé en France, c’est pareil mais sans l’intéressement et la participation. On fait un calcul sur ce que devrait coûter l’hôpital sur une grosse moyenne annuelle mais on ne regarde pas le reste des statistiques, c’est à dire les disparités de service, de périodes, de régions… On veut un résultat net sans déficit, voir avec du gain ce qui n’est pas possible par rapport à une mission de service public. L’hôpital et la santé, c’est justement de l’imprévisible et le Covid-19 vient de le prouver. Si demain ma boite a un fournisseur qui ferme soudainement, elle va basculer sur un fournisseur de secours en payant probablement plus cher. S’il y a un tsunami et qu’il n’y a plus de fournisseurs, et bien on ne sait plus faire. Notre monde en est arrivé là autant pour la santé que pour l’économie par cette recherche d’hyper-spécialisation et de rentabilité. Pas partout quand même puisque deux pays sortent du lot : Japon et Corée du sud. Ces deux pays (et à une moindre échelle, Taïwan) ont le plus faible tôt de mortalité de ce virus et n’ont pas eu recours au confinement car là bas, l’hygiène est une seconde nature.
Je ne peux y voir qu’un symbole dans tout cela, celui d’une Terre ou une Nature qui se venge en nous envoyant une bonne petite mutation mortelle. Hasard, c’est par la Chine, le pays où on a tout délocalisé par appât du gain, que c’est arrivé. Ça s’est propagé par nos canaux économiques et ça a même touché des communautés religieuses qui se croyaient un peu trop invincibles. Il y a des fous/folles qui parlent encore de complots etc…Pas besoin de complot quand notre mode de vie y suffit largement. On s’attaque toujours à la gestion chinoise (même s’il y a toujours des reproches à faire), au retard supposé de traitement, alors que l’on a eu deux mois de plus qu’eux et que nous sommes plus touchés en pourcentage de la population et que nous ne savons pas produire suffisamment de tests, d’équipements de protection, etc…quand même des pays moins riches en Asie y arrivent (quand vous lirez cet article, vous hallucinerez sur les chiffres). Je la jouerai modeste si j’étais un quelconque responsable ou éditorialiste à deux balles (dont une pour ...Jean Michel qui ferait bien de s’apercevoir qu’il ne sert à rien, surtout par rapport à un médecin). Nous sommes un peu plus conscient aujourd’hui d’être sur une même planète, un univers fini qu’on ne peut continuer à exploiter comme avant.
Pas comme avant c’est faire du télétravail aujourd’hui. Mouais, c’est surtout accentuer des inégalités pour moi entre les gens du service, du marketing, et ceux qui produisent, qui créent réellement avec leurs mains. Ces derniers se retrouvent souvent en chômage partiel ou exposés inutilement. Et puis on a vu des services en ligne exploser littéralement sous cette nouvelle charge. Là encore, on a dimensionné en prenant une moyenne de charge avec un petit bonus ….mais pas en envisageant le pire. Toujours au moins cher sans analyse de risque. On a surtout eu l’impression qu’Internet, c’est magique, sans penser que derrière, il y a du matériel et …des humains pour le faire fonctionner. Je vais y revenir. J’ai vu Cyrille parler d’utiliser les outils favoris de ses “utilisateurs”, les élèves. En effet, leur terminal à eux, c’est le smartphone ou un PC perso non standardisé. Ma boite me fournit un PC avec un package logiciel, un VPN qui sécurise les données et des outils efficaces de téléconférence. Un même mot, deux pratiques aux antipodes et entre les deux des petites boites qui n’ont pas les moyens de mettre en place cela pour leurs employés qui n’ont souvent pas de PC professionnel. Le réseau internet et/ou mobile n’est pas non plus près à absorber des flux vidéo de toutes sortes comme cela, en tout cas, pas partout. Déjà qu’on se tape les trois quarts de bandes passantes avec du Netflix et du Youtube…Ces flux vont augmenter avec le confinement (ouf, ils ont limité ca). C’est tout une révision des outils qui est nécessaire dans les entreprises et surtout les services publics. La grande idée de mettre du Teams de Microsoft et tout centraliser a montré ses limites, par exemple dans ma boite.
Mais je me suis alors posé la question de l’après. Quand on va réaliser qu’on peut rester chez soi pour travailler plutôt que perdre deux heures dans les transports, on va demander naturellement à l’employeur de plus télé-travailler. A part le tableau pour dessiner rapidement, il ne me manquait pas grand chose dans mes réunions. Si, du contact humain et ça c’est difficilement mesurable. Mais après, je me trouve plus efficace sur des activités où j’ai besoin de calme, de réflexion et de recul. Je suis forcément moins efficace quand j’ai besoin d’une vision terrain des choses. Il faudra retrouver un nouvel équilibre après cette période mais elle va laisser des traces. Des traces, justement, elle devrait en laisser chez les décideurs et les TPE qui vont devoir se structurer autrement dans leur travail, revoir les outils de travail partagé, héberger autrement, etc…. Il va falloir offrir des outils pour ce type de risque, et des outils qui soutiennent la charge.Ah le risque…
Il se trouve que je suis dans une mise en place d’analyse et gestion du risque dans mon métier sur base de méthode AMDEC. Je ne vais pas revenir sur l’exécrable gestion de ce gouvernement bien français, hautain et donneur de leçon. Malheureusement, c’est nous qui en payons le prix. (Cf la gestion japonaise, coréenne après une période de propagation rapide). Mais il faut maintenant passer à une gestion du risque qui ne met pas l’aspect financier en premier dans la décision mais l’aspect humain, ou sinon qualité de service. Cela vaut aussi bien pour les clients que nous sommes que pour les fabricants que nous pouvons être. Je pèse aujourd’hui le risque selon la gravité, la probabilité d’apparition et la capacité de détection. Par exemple, on va peser la gravité de panne d’un serveur, mesurer la probabilité que cela arrive et quand cela va arriver (là en général il est trop tard mais peut-être peut-on faire des tests). En fonction de cette pesée de risque, on va rechercher ce que l’on peut améliorer, les réponses que l’on peut donner pour le diminuer. Pour notre cas de Covid-19, c’est voir si on peut avoir des moyens de tester, des moyens de confiner, de protéger. Le coût investi peut être mis en relation avec le coût de traitement de la maladie si elle se propage. On peut aussi utiliser les Paretos. Dans notre cas du Covid-19, le retour d’expérience imposera de revoir l’utilité de stock tampons, de les dimensionner, de prévoir les renouvellement lorsque les flux logistiques défaillent, etc…et de prévoir un mode pandémie pour toute l’économie.
Nous n’avons hélas pas cette culture du risque parce que ce qui l’emporte c’est le gain immédiat et l’individualisme...Il en est même de même entre pays, chacun gardant pour lui ses moyens quand le voisin est touché alors qu’il risque de nous contaminer. Nous l’avions vu dans la gestion des réfugiés en Europe. Il n’y avait aucune raison que cela change. Nous avons laissé l’Italie seule. Nous avons laissé la Grèce seule….Et les dominos ont continué de tomber. C’est finalement la Chine qui aide l’Italie pas l’Europe, profitant de cela pour montrer aussi sa puissance et les bienfaits de sa “rigueur”. Et dire que nous sommes 20 fois moins en France et que l’on se bat pour des rouleaux de papier toilette. Comprenez moi quand je dis que je préfère souvent faire la queue chez Tang Frères à Paris que chez Carrefour. C’est juste une question d’atmosphère… Autant vous dire qu’ayant toujours un petit “fond de roulement” dans mes courses, je n’ai pas cédé à l’hystérie. J’avais un peu augmenter certaines denrées essentielles depuis 3 semaines. Et puis cette semaine, j’ai évité l’hystérie des grandes surfaces. Je fais mes courses “à l’allemande” (ceux qui connaissent comprendront). Apprenons à faire autrement !
Je ne sais pas si je ferai un autre billet sur le sujet, ni ce qu’il adviendra. Je sais juste que nous commençons à voir qu’il faut revenir aux basiques, à ce que l’on sait faire plutôt qu’acheter. Certains auront appris à cuisiner. D’autres à faire du pain, des frites maisons, des pâtes maisons et tant de choses simples et essentielles. Certains auront appris à configurer leur serveur, à utiliser des outils de vidéo-conférence. Et puis surtout on apprend ce que c’est que l’opulence dans laquelle nous nous complaisons, à réaliser les luxes que nous avons. (Apparemment pas trop chez les citadins friqués qui fuient en contaminant ou veulent faire du sport 3 fois par jour). J’espère que ces petites leçons seront durables dans nos esprits. Et comme dit quelqu’un, que nous nous orienterons un peu plus vers des choses qui nous laissent plus libres. Je pense évidemment aux logiciels et loisirs, mais aussi à ces produits alimentaires qui deviennent aussi comme des drogues. En revenant à des produits de base, on réapprend un peu plus le contenu des choses. C’est quand nous n’en avons plus que nous apprenons à nous en passer. J’ai toujours penser que la contrainte stimule la créativité…. ça n’a pas empêcher de voir partir les pâtes à tartiner, j’ai l’impression.
Cette épreuve du Covid-19 est bien sûre tragique mais pas tellement plus que d’autres maladies qui tuent plus dans le monde (rien que la malaria…). Enfin pour l’instant car le pire est de ne rien maîtriser, de ne pas savoir qu’il y a un traitement. Ce n’est sûrement qu’un avertissement de plus. J’aime penser qu’il en sortira du bon, au moins dans une portion de la population. Cela sera peut-être l’occasion d’un deuxième billet. Celui de la semaine prochaine est déjà écrit (il devait paraître aujourd’hui) mais qui sait ce qu’il deviendra. Comme nous…ha, ha, ha ! Allez, on va appeler le Docteur… Feelgood !