Blog - Un pas en avant, un pas en arrière

Drôle de période, drôle d’année où le meilleur et le pire se succèdent. J’ai laissé passer plus de temps que tu ne l’imagines, lecteur, entre ce billet de blog et le précédent…

Parce que j’ai du composer entre la douleur, la tristesse et le besoin, la mission. J’ai déjà parlé de ce poste « décroché » en fin d’année dernière et qui s’ajoutait en fait à ce que je faisais déjà, même si on me dit « non, mais ça tu ne fais plus ». Oui, sauf qu’il faut trouver quelqu’un d’autre pour le faire… Et sans embaucher, former, même en interne, ça ne se fait pas par miracle. Tu rajoutes le virus, l’éloignement, les gens qu’on doit maintenir chez eux pour raison de santé et tu te retrouves à changer tes plans tout en ayant les mêmes objectifs annuels pour ton taf. Et bien même si j’avais l’impression d’être le seul à y croire, j’ai continué à faire avancer mon truc et à cocher la première case, celle de mon service, du laboratoire de mesure que j’ai construit avec ceux qui y croyaient un peu (euh…deux). Deux ans de travail, A peine 6 mois qu’on a les locaux qui vont bien et la reconnaissance de la profession à la fin. Il y a encore beaucoup de travail pour arriver à l’excellence mais ça fait plaisir : On a avancé, on a sauvegardé peut-être des postes, même si c’est fragile. On a aussi créé et sauvegardé des compétences, acquises souvent par soi-même parce qu’il y a longtemps que cela a disparu des plans de formation. Voilà l’industrie en France où l’on parle « cœur de métier », en oubliant que celui d’hier n’existera plus demain et que celui de demain n’est pas encore au niveau. Pendant ce même temps, l’Inde et la Chine appellent au secours pour être au même niveau d’autonomie. Là encore, ça ne se fait pas en faisant de la simple recopie, comme beaucoup le croient…

Un pas en avant, il en reste trois autres à faire pour les marches devant soi…Et pourtant je dois encore justifier de la charge, du coût, du besoin pour ne pas que tout disparaisse d’un coup de stylo sur une ligne, ou plutôt d’un appui sur la touche « supprimer » dans un tableur. Parce qu’on te fait aussi comprendre que tout tient debout parce que tu es là… mais sans toi on fait comment ? Y’a qu’à me cloner pardi… Mouais, facile mais faut trouver quelqu’un qui aime ce que je fais et croyez moi c’est rare. J’ai même réfléchi à mes binômes d’il y a 25 ans mais non, nous avons choisi des chemins différents, avec d’autres affinités même pour ceux qui ont tout appris par eux-même comme moi. Des jeunes ? Pas franchement attirés par cet univers ou ce métier, ou bien avec le grade d’au-dessus donc ne restant pas là dedans. A mon niveau de diplôme, on est amené à faire d’autres choses…Enfin c’est l’impression que ça me donne. J’ai bien fait de ne pas suivre la voie tracée, du moins pour mon bien être.

C’est assez étrange d’ailleurs car je ne sais pas au fond ce qui m’attire dans ce monde plein de carcans, de règles, d’écueils, de gestion de risque. C’est un peu comme un jeu en fait avec des niveaux, des boss à passer (auditeurs, chefs, collègues démotivés…), des apprentissages, des essais infructueux qu’on doit reprendre, encore et encore jusqu’à tout comprendre. Il y a à écrire, écrire encore, partager aux autres, recruter des « compagnons d’armes » en prouvant qu’on a raison, aider parfois, donner de soi et être récompensé, être trahi aussi. La vie quoi… Je me souviens d’un chef qui avait écrit que j’avais le goût du challenge. Oui et depuis tout petit en plus, surtout des causes perdues. Quand tu as quelques capacités en sport mais que tu n’es pas populaire, tu te retrouves vite dans « l’équipe de la lose », celle des mecs et des nanas qu’on ne choisit jamais. J’ai eu cette impression à un moment en récupérant des gens qui n’étaient pas spécialement en vue, plutôt virés d’un autre service, en recherche d’un nouveau départ, ou plus souvent d’une voie de garage en attendant la retraite. On fait avec et quand on prend le temps d’écouter, ça se passe souvent bien mieux. Il y a quelques jours, un collègue s’est proposé de m’aider sans que je ne demande rien, et ça fait plaisir. Mais ça retombe vite aussi dans les travers lorsqu’un petit chef n’y croit pas, est trop tatillon, pas assez « agile » (comme ils disent) …

Et c’est vrai que je suis dans un service où il faut aller chercher cette confiance avec les dents tout en étant capable de faire tout selon les urgences. Mon ancien grand chef, je l’avais connu il y a 20 ans, lui aussi un « petit diplôme » qui a su progresser. Un autre a su me donner à nouveau la chance dans ce métier après que j’ai tenté autre chose, par curiosité, un autre métier quitté pour de mauvaises rencontres. Ensuite tu ronges parfois ton frein, parce que ça bouge, parce qu’on évolue, parce que le service croît puis décroît, puis rebondit. Les chefs changent…J’en ai encore un que j’ai connu dans une première vie, un autre qui était un collègue avec du potentiel (comprendre le bon diplôme) mais qu’on a fini par dégoutter aussi (comprendre « ça serait bien que t’ailles voir ailleurs, tu es jeune »). On se parle encore via l’Internet. Bref, ce fut une période intense, elle l’est encore pour un paquet de temps… Enfin je l’espère parce que les fusions à venir sont inquiétantes.

peinture

*Ferdinand Georg Waldmüller Exhausted Strength (1854)*

Ces derniers temps pourtant il y a eu du moins bon, comme je m’en suis ouvert ici. De quoi ressortir totalement épuisé certains jours, plus moralement que physiquement parfois mais l’adrénaline des challenges parvient à faire des miracles. J’ai un peu relâché mon attention sur les textes, les corrections et le contenu. Vous en verrez passer encore qui auraient bien besoin d’un toilettage. J’essaie de me préserver quand même, parce que j’ai aussi des personnes à m’occuper, des êtres vivants qui comptent sur moi. Après, pour le boulot, même si on me dit que je suis un peu trop indispensable, je n’ai pas l’intention de rejoindre de si tôt les indispensables dans le cimetière d’à côté. J’ai encore de la marge avant le burn-out, surtout quand je prends le temps d’avoir du recul. J’espère que je sentirai le moment où je suis trop dans le jus, sans pouvoir garder mon œil critique.

J’avoue qu’avec le télé-travail, j’ai un peu moins ces petits moments de marche qui me font regarder les choses autrement. Je n’arrive pas à rester plus d’une heure assis devant un écran. Pas un problème de circulation sanguine ou d’attention mais juste que j’ai besoin de reposer ma vue, prendre du recul sur ce que je viens de faire et en même temps, il y a des moments de multiples sollicitations aussi. Rester « la tête dans le guidon », ça peut le faire pour des actions répétitives … et encore, on trouvera sans doute une manière d’améliorer ce que l’on fait si on lève un peu le nez au bout d’un moment. Alors en ce moment, les actions multiples ne manquent pas et je pourrais me contenter de les faire une par une, chronologiquement ou par ordre d’importance. C’est là que j’ai pris le temps de me poser quelques questions sur des regroupements et optimisations possibles, notamment en en discutant avec d’autres. Un peu comme le blog, je laisse mûrir certaines choses.

Et plus personnellement, sur des actions à faire à la maison, c’est un peu pareil. La vie se charge déjà de revoir les priorités. J’ai dû encore faire quelques pas en arrière sur quelques travaux, repoussés dans les périodes plus calmes, ou supposées telles. Tant que je n’oublie rien (c’est là qu’il faut rester organisé)… A un moment, la priorité c’est évidemment nos êtres chers. Le reste n’est quand même qu’accessoire. Avec ce qui s’est passé récemment, on se dit aussi que la loi des séries, … Nous avons plutôt tendance à envisager le pire, à mieux voir les risques aussi qu’à d’autres périodes, mais aussi à douter de ce que l’on a fait, de nos réactions, de nos choix. Facile à dire qu’il faut regarder vers l’avenir quand le passé reste si présent. Il y a encore eu des surprises en plus, des séjours hospitaliers dont on se passerait, de la famille à assister. C’est l’âge aussi et ça n’ira pas en s’arrangeant. Et l’on voit que l’hôpital reste encore un service sous perfusion avec même plus de temps pour dégraisser l’administratif, faire les maintenances nécessaires, tout cela pesant sur l’exploitation. Déformation professionnelle…

Vous me direz que ce sentiment actuel, c’est le deuil…Et effectivement, si je n’avais pas quelques challenges pour m’occuper l’esprit, ça serait différent. En dehors du boulot, j’ai heureusement des lectures, des activités ludiques, l’écriture, le dessin et ça fait du bien. Comme je le disais, j’ai sans doute manqué de concentration sur quelques activités, sur quelques articles. Les choix que j’ai fait dans ma pile à lire ou à voir ou à écouter m’étonnent parfois. J’ai curieusement repris un peu le fil du rap dans la fin des années 90 sans vraiment comprendre pourquoi. Enfin si, c’est l’écoute d’un podcast d’inter qui m’a un peu poussé à ça. Le retrogaming m’a remis sur les jeux DS d’abord, Amstrad ensuite et de fil en aiguille … sur tout et rien. Tout ça, ça arrivera sur ce blog de manière totalement désordonnée. De même que maintenant j’intègre des vidéos sur ma chaîne Peertube et petit à petit j’améliore, avec des idées pour le futur. Je n’ai pourtant pas l’intention de rajouter des commentaires avec ma voix de … téléphone, ou de faire des podcasts. Chacun à sa place.

Dans cette période où certains voyaient l’humanité faire des pas en avant et que l’on fait finalement en arrière, il n’y a rien d’évident à mener sa propre barque. Je vois des « amies » de l’autre côté de la méditerranée dans un pays dévasté. Je vois la famille essayer de survivre dans des grandes puissances submergées. Je vois d’autres connaissances se faire parfois déborder, perdre le fil sans qu’il soit aisé de tendre la main, cette main déjà bien occupée. Continuer à avancer, malgré tout, ou au moins rester sur place plutôt que reculer. Je ne sais pas toujours où je vais, ballotté par les flots de la vie, refaisant le point dans les périodes d’accalmie pour mieux reprendre un cap, même si ce n’est pas le bon. « Ce n’est pas la destination mais la route qui compte.”

Avec ces pas en avant et en arrière, je pourrais avoir l’impression de faire du surplace. Rien que sur cet article que j’ai entamé sans vraiment de plan ou de notes, j’ai l’impression de tourner un peu en rond. Vous l’aurez encore compris, il n’est pas écrit d’une traite et à force de lecture et relecture, il se construit, se détruit, se reconstruit. Il participe à une part d’introspection, plutôt salvatrice en ce moment. Je n’ai pas abordé le sujet rabâché du COVID qui me semble devenu un épouvantail pour masquer bien des choses. Là aussi, du surplace et pas de remise en cause. Pourtant j’observe toujours le monde, son évolution. Plus que moi même, j’ai l’impression que le monde fait du surplace, progressant parfois dans sa prise de conscience, régressant sur ses actions, créant pourtant des progrès, quand on régresse sur d’autres points.

firefox

Dernier soubresaut, celui de la fondation Mozilla qui se sépare d’un quart de son effectif, dont on ne comprend plus les objectifs sinon de se faire du fric le plus rapidement possible… et donc ça ne passe plus par Firefox, si on comprend bien (heu…), mais par des abonnements à des VPN, à Pocket, … Je ne suis plus client de Firefox depuis peu. Il n’est plus adapté à mes terminaux, n’en finit pas de ramer ou bugger et manquer de fonctions, prendre du retard. Pas plus de Pocket (ni même de Wallabag), ou d’un VPN pour moi. On est clairement dans 3 pas en arrière en espérant en refaire en avant plus tard mais pas avec cette gouvernance. Ça change tout le temps, et le plus terrible c’est qu’on ne voit plus qu’un moteur de navigateur à l’horizon et la puissance de Google avec. Dans ma vision géopolitique de la situation, je ne vois qu’une solution politisée émergée, c’est à dire chinoise, russe, voire indienne, qui serait provoquée par une disparition de chromium, par exemple. Nous n’en sommes pas là et le panda roux est sous perf et respirateur dans le service covid++. L’hôpital du libre manque aussi de médecins et d’infirmiers, à force de les avoir dégoutté, j’en ai peur. Pourtant les volontés n’attendent que de croire à un autre projet similaire pour repartir. Car Chrome, Edge, Safari c’est quand même bien de la merde aussi…à force de rustines et artifices en tout genre pour ne pas être emmerdé.

Je suis finalement parti d’événements personnels pour en arriver à cette marche du monde, au fonctionnement de l’humain. Chassez le naturel… La marche du monde devrait aussi me dicter des choix dans mon activité professionnelle. J’observe que des boites concurrentes sont au bord du gouffre quand nous l’avions anticipé mais dans la douleur. De moins en moins de moyens, de plus en plus d’activité, moins de personnes, et … des profits répartis de manière inégale. Il y a de quoi discuter, se préparer à des luttes, des combats. J’ai parlé de la raréfaction des compétences. Je parle de certaines compétences oubliées par rapport à de nouvelles qui tardent à se développer. En étant en relation avec d’autres pays dans le monde, c’est aussi plus simple de se faire une idée de la situation. Là aussi, ça stagne car le low-cost s’embourgeoise petit à petit pour rattraper le niveau du luxe, tandis que le luxe rogne sur la qualité pour le profit. A un moment, ça va coincer, ne serait-ce que socialement.

Oh et puis finalement tout ça, c’est si important ? Si je parle de bien d’autres choses ici, c’est pour garder une part d’insouciance, ne pas se faire du jus de cerveau à boire bien mixé. On peut parler d’évasion mais il faut en avoir, ne pas se prendre trop au sérieux non plus. Dans mon environnement de travail si bordé, réglé, normé, heureusement qu’il y a de la place pour l’humour, pour quelques petits délires. Je sais que ce n’est pas la folle ambiance dans d’autres laboratoires comme le mien, enfin en apparence mais faut quand même se marrer, non ? Si je peux être sérieux, il faut voir les formations que j’écris en ce moment. Je n’ai pas envie de voir les « stagiaires » s’endormir après le repas ou poursuivre leur nuit en se disant que ce que je vais dire est chiant. Bref, ça tire de la « private joke », des clins d’œils geeks et pop culture. J’espère que ça plaira parce qu’il y en a qui n’ont pas été livrés en second degré depuis leur naissance. Pff, pas graveeeee…. Allez, je vous laisse avec une voyagiste !

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Ecrit le : 22/08/2020
Categorie : reflexion
Tags : blog,reflexion,société,

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