BD - Munch de Steffen Kverneland (2014)
Figure majeure de l’expressionnisme pictural, Edvard Munch est finalement moins connu que son emblématique tableau “Le Cri”. Il fallait bien un dessinateur norvégien pour lui rendre hommage.
Je dois dire que j’avais oublié la nationalité de ce peintre, tant sa carrière est aussi liée à Berlin qu’à son pays d’origine. L’expressionnisme lui-même est souvent réduit à l’Allemagne alors qu’il faut élargir ce mouvement à tout le nord de l’Europe. Steffen Kneverland a adopté une démarche atypique pour constituer cette biographie en image. S’il s’inspire un peu du style de l’artiste, il a essayé de ne pas imaginer sa vie mais de s’en tenir à des déclarations réelles de Munch et de ses contemporains. Il a même sorti cette œuvre sous la forme d’une série avant que l’édition française nous offre cela en un seul ouvrage.
C’est finalement ce qui peut dérouter un peu à la lecture : Des scènettes mises bout à bout mais qui manquent parfois de lien. Si Munch peignait ce qu’il avait vu et pas ce qu’il voyait, Kneverland dessine ce qu’il a vu en Munch à travers les écrits et documents qu’il a pu réunir. Nous n’entrons alors pas dans la tête de Munch mais sommes des sortes de témoins privilégiés de la vie de cet homme complexe, étonnant et déroutant. Evidemment, il y a le folklore habituel sur les artistes torturés : sexe, alcool, dépression… On s’en doute un petit peu en connaissant l’oeuvre de Munch ou même la démarche de l’expressionnisme. Mais on s’interroge finalement sur les motivations de l’artiste, ses relations avec ses pairs, les femmes qui ne cessent de le hanter.
Kneverland ne tente pas trop de nous orienter ou d’apporter des réponses mais rend hommage à sa manière dans une BD expressionniste. Car il y parle aussi un peu de lui, d’une certaine manière, notamment dans l’introduction, dans une forme d’autodérision. L’ouvrage est très beau, plus original que bien des biographies de peintre que j’ai pu lire récemment. Il donne envie de s’y replonger comme d’aller voir les tableaux du maître norvégien, ce que j’ai assez peu fait (déjà parce qu’ils ne sont pas exposés à coté…). Une BD qui s’adresse évidemment aux amateurs d’art mais aussi à ceux qui se sentent tout simplement touchés par ce que l’on connaît de Munch.