Musique - Residente - (2020)

J’ai découvert cet artiste porto-ricain un peu par hasard avec un single plus récent, avant de me pencher sur son premier album solo. Car c’était un des membres du Calle 13, un collectif de hip-hop conscient hispanique.

Je ne parle pas espagnol, mais j’ai quand même compris les messages des quelques titres que j’ai entendu. On est dans du Hip-hop mêlé à du Reggaeton sur fond de revendications politiques et environnementales. Le fait que cela vienne de Porto-rico, cette île au statut très particulier, n’est pas un hasard. Et puis c’est totalement dans le prolongement de Calle 13 qui était déjà dans la revendication sociale, l’anti-consumérisme, mais musicalement était déjà dans une expérimentation qui allait plus loin que le simple Hip-hop.

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C’est totalement le cas ici où Residente, après une intro parlée, envoie du lourd avec “Somos Anormales”, que l’on pourrait traduire par “Nous sommes anormaux”. On y trouve un sample plutôt ethno (des chants d’un groupe de la république de Touva en Russie, assez proche des mongols), des guitares saturées, une rythmique appuyée et plutôt électro et un flow de hip-hop efficace. Comme il le dit dans l’intro, tout part d’un test ADN qui montre les liens avec de multiples peuples du monde. Et cette anormalité, c’est aussi la reconnaissance que nous sommes à la fois semblables et différents. Ainsi le voyage continue en Chine avec “Una Leyenda China”. Cette fois c’est un chant traditionnel de l’opéra de Pekin qui est intégré avec un flow plus lent. Residente nous compare à des insectes, nous qui étions tigres ou dragons. Un texte très poétique qui dénote dans le rap actuel…si on peut considérer que c’est un rap.

On part ensuite pour le Ghana d’Haruna Fati et des chants traditionnels sur une rythmique presque Industrielle. Un des moments forts de l’album. On y parle de l’inventivité de l’Humain mais ne va-t-elle pas trop loin, justement ? “Il n’y a pas de caviar ici mais du maïs”. Petite touche française avec la chanteuse et actrice Soko, mais le texte reste en espagnol dans “Desencuentro”, à quelques strophes près. Une chanson d’amour en duo qui est entre hip-hop et électro-pop. Un petit moment de douceur avant … “Guerra”. Et cette fois nous sommes en Azerbaïdjan et en Ossétie puisque le groupe s’y réfugia quand la guerre reprit avec l’Arménie au Haut-Karabakh. Encore une fusion réussie entre ces styles de musique. “Que les jambes de la planète Terre tremblent, Aujourd’hui je suis venu gagner et je suis fait de guerre”. Et après la guerre vient l’Apocalypse, “Apocaliptico”. Et c’est encore en chinois qu’il y a des intermèdes avec Duan Ya Wen, même si on s’éloigne des chants traditionnels pour quelque chose de plus électro-pop du plus bel effet. Finalement, l’apocalypse se fait en douceur.

Nous revoilà aussi en Afrique, au Niger avec Omara “Bombino” Moctar sur “Sombra”. Quelques youyou sur une rythmique proche du blues malien et “Nous sommes les ombres qui n’ont pas de visage, Nous sommes les ombres qui n’ont pas de nom.” Un bon moment aussi dans cet album. Un titre inspiré par Thomas Sankara, ancien leader du Burkina Faso. On reste aussi au Ghana avec “Milo” qui mèle ici les chants ghanéen à des violons et un flow tout en délicatesse. Et c’est tout le charme d’un album qui alterne revendication sociale et poésie avec comme lien les paroles de Residente. Il explose les frontières musicales pour nous dire que nous sommes simplement des “résidents” de cette planète et nous parle finalement de lui et de nous, humains. Alors on pourrait enfermer cet album dans une catégorie, mais c’est simplement de la musique.

le titre qui m’a fait découvrir Residente n’est pas sur l’album video


Ecrit le : 04/05/2023
Categorie : musique
Tags : musique,hiphop,hispanique,2020s

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