Littérature - Les Guerriers de l'hiver d'Olivier Norek (2024)

On connaît très peu ce que l’on appelle la “Guerre d’hiver”, conflit ayant eu lieu en 1939-1940 entre la Finlande et l’URSS. Moins de 100 jours et plus de 500 000 morts pour un conflit qui eut un impact majeur.

Le romancier Oliver Norek, plutôt branché polars, nous emmène sur les traces de ces combattants finlandais qui résistèrent héroïquement à l’ogre russe. Tout parallèle avec un conflit actuel n’est pas fortuit. Staline voulait agrandir sa sphère d’influence puisqu’il fut un temps où les finlandais étaient sujets du Tsar. Mais ces finnois entendaient bien garder une indépendance gagnée de haute lutte. L’autre parallèle que l’on peut faire, c’est avec le chef d’oeuvre de Eric Maria Remarque, “A l’ouest rien de nouveau” où la description des horreurs et des absurdités de la guerre atteint des sommets.

Autant le dire tout de suite, c’est bien écrit mais ça n’atteint pas le livre de Remarque. Norek fait le choix de suivre particulièrement un certain Simo, personnage réel (comme tous ceux du livre) qui fut le plus grand sniper de tous les temps. Ce fermier se retrouve mobilisé en ne croyant pas à un conflit. Mais Staline a fait créer un faux incident frontalier pour justifier de l’invasion. Et il n’a que faire de savoir si son armée connaît son ennemi, connaît le terrain, a la logistique en conséquence, etc. Sûr de sa force avec une armée 100 fois plus puissante, il lance une vaste offensive pensant en avoir pour 2 semaines pour atteindre Helsinki. Ca ne vous rappelle rien ?

Norek nous emmène à la fois sur le front coté finlandais et dans les préparatifs de Molotov et des généraux russes. Coté finlandais, la stratégie est à la main du Maréchal Mannerheim, aristocrate ayant fait ses armes dans l’armée du Tsar et qui connaît bien la doctrine de l’armée russe : Un rouleau compresseur qui ne se soucie guère des pertes humaines et prépare le terrain par un tapis de bombes. Là aussi, rien n’a vraiment changé. Il a fait fortifier la frontière avec la Russie mais dispose de peu de munitions et d’hommes, d’aucun tanks et de maigres aéronefs. Sur le papier tout semble perdu…mais il compte sur la fraternité des combattants et surtout le fait que les finlandais défendent leur terre ce qui leur donne un net avantage par rapport à des combattants peu motivés, mal nourris et poussés par des commissaires du peuple sans scrupules.

Norek nous décrit très bien ces moments de guerre, la boucherie qui n’a rien à envier à la première guerre mondiale : Corps broyés et déchiquetés, vacarme assourdissant et continu, conditions de vie infernales…dans un froid polaire. Sauf que les finlandais connaissent leur terrain, sont camouflés par le blanc de leur uniforme, ont des skis et des protections. Mais surtout ils ont Simo, “la mort blanche” pour les russes qui le croient immortel au fur et à mesure de ses succès. Mais Norek se penche finalement plus sur ces moments de guerre, ces escarmouches ou batailles plutôt que sur l’état d’esprit des combattants. Il saut souvent du coq à l’âne, même s’il parle de la folie qui gagne ces paysans et ouvriers. Le lecteur est donc parfois moins impacté par ces horreurs, cherchant plus à comprendre qu’elle issue peut avoir cette guerre. Et c’est là que l’on voit le parallèle avec le conflit ukrainien qui peut paraître sans fin aussi.

Malgré la trahison de la France et l’Angleterre, un armistice sera conclu avec quelques pertes territoriales…Mannerheim fera son possible pour que la Finlande ne soit pas embarquée comme d’autres pays scandinaves dans le conflit russo-germanique qui suivit. Et on peut effectivement pensé que sans ce coup d’arrêt à l’armée russe, Hitler n’aurait pas précipité son attaque. Mais c’est aussi un coup d’arrêt au futur bloc de l’est qui permit de dessiner l’Europe telle qu’elle est aujourd’hui. Olivier Norek se focalise donc uniquement sur l’héroïsme des combattants, la vanité de ces combats, l’absurdité de ces pertes humaines coté russe surtout. Tout ça pour des bouts de forêt et quelques minerais…Il ne parle que peu des choix complexes à faire face à la montée en puissance du nazisme. Il fallait un héros pour bâtir le fil rouge du livre et c’est Simo que l’on sent évoluer et qui voit ses amis disparaître. Un héros discret dans la vie mais un peu trop dans le roman, sans doute volontairement car le véritable sujet était de rappeler ce qu’est une guerre. De ce point de vue, c’est réussi et ce livre s’ajoute à tant d’autres qui ne suffisent pas à les empêcher.


Ecrit le : 21/10/2025
Categorie : litterature
Tags : livre,histoire,roman,2020s,1940s,guerre

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