BD - Pour Sanpei de Fumiyo Kōno (2006-2024)

La mangaka Fumiyo Kōno (Kouno) pensait arrêter son métier avant d’entreprendre cette petite série sur “un vieux”, comme elle le dit. C’est l’occasion d’une tranche de vie d’une famille japonaise qui rapproche les générations.

Sanpei est grand-père. Il vient de perdre sa femme Tsuruko et, étant à la retraite, il se retrouve un peu perdu dans la vie. Il emménage avec la famille de son fils. C’est donc avec sa belle fille Reika, sa petite fille Nona et son fil Shiro que le manga commence. Mais pour redécouvrir cette vie quotidienne loin du salary man qu’il était, il trouve ce qu’a laissé sa femme : Un énorme carnet de note qui décrit à la fois comment tenir une maison et des petits détails sur chacun. Et s’il avait ignoré tout de Tsuruko ?

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Au début de ce manga disponible en tomes et en intégrale, on a l’impression de lire un mode d’emploi de la bonne ménagère nippone. Et on s’amuse de la maladresse de Sanpei. C’est pour mieux montrer aussi toute la charge mentale que devait supporter Tsuruko durant ces années passées. Shiro ne critique-t-il pas son père au début de l’ouvrage sur cela ? Mais le personnage de Sanpei évolue: Il se met à l’ouvrage, prend du temps, beaucoup de temps à lire, apprendre ces notes, s’essayer à tout avec plus ou moins de succès. Et puis il faut la rencontre d’une jeune femme, Mademoiselle Senkawa. Elle devient un peu le fil rouge du reste de l’ouvrage. Fumiyo Kouno s’est adapté au rythme de parution de son histoire dans Maga Action et on sent des changements de point de vue. Elle développe ainsi patiemment tous ses personnages. Dans les notes de fin d’ouvrage, on sent ainsi qu’elle y a mis beaucoup d’elle même et de ses expériences.

J’avais déjà parlé de cette autrice pour le très beau “Le Pays des Cerisiers”. Le dessin est toujours précis et épuré. On prend du plaisir à regarder simplement cette vie quotidienne qui pourrait paraître banale mais dont on apprend les codes. N’est-elle pas comparable à notre vie de tous les jours pour les tâches ménagères. Le ménage se répète comme la cuisine ou la couture. Il est facile de s’en débarrasser en se reposant sur les autres mais il y a aussi moyen de partager cela en famille, en prenant en compte les besoins de chacun. De grand-père un peu bourru, Sanpei se transforme. Et si Fumiyo Kouno pensait au départ faire un manga sur les vieux, c’est plus sur la vie quotidienne d’une famille avec le relationnel, qu’elle nous capte. Elle aussi ressort transformée de cet essai.

En lisant ce gros volume de près de 300 pages, on a l’impression d’un soap à la japonaise, un feuilleton du quotidien avec quelques scènes de comédies. Cela est découpé en courts épisodes d’ailleurs. Certains sont quasiment muets, comme celui ou Nona s’occupe d’un chien du voisinage pour le dessiner. Il y a souvent des chutes inattendues, de l’humour mais surtout une belle sensibilité qui crée chez le lecteur cette émotion. La native d’Hiroshima a d’ailleurs mis un clin d’oeil à un des ses inspirateurs. Un manga qui prouve encore toute la diversité de cet art. Il ne s’adresse pas aux plus jeunes mais bien à ceux qui ont l’age de Shiro ou Sanpei. Et cela fait une belle respiration aussi dans l’océan de séries survitaminées.

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Ecrit le : 07/07/2025
Categorie : bd
Tags : bd,manga,2000s,japon,vieillesse,famille

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